les mains dans les poches, tu navigues sous le tunnel des requins. ton regard se perd sur l'immensité qui file devant toi, le bleu intense des profondeurs attirants ta curiosité. visiter l'aquarium t'avait semblé être une bonne idée, en soit. de quoi se détendre avait de vraiment t'enfermer dans la routine des cours du programme. alors tel, un touriste, tu continues ta visite. tes yeux aussi noir que le pétrole sautant de vitre en vitre, comme si tu observais pour la première fois, les merveilles du monde sous-marin. finalement et après plusieurs minutes, tu te plantes devant une vitre où la faune semble avoir totalement disparu. tu plisses un peu les yeux et tu te penches en avant. gauche. droite. droite. gauche. il y a rien. pas même un mouvement d'eau. alors, tu recules et tu va jusqu'au panneau indiquant l' occupant des lieux. il y a une image d'un poisson. ouais. ok. mais malheur. le texte est en anglais. tu avances un peu plus vers les mots et tu poses ton doigts sur la première ligne. comme un gamin qui apprend à lire pour la première fois. tu jures en arabe, ton visage se décomposant aussitôt. putain. il va te falloir trois heure pour déchiffrer ces hiéroglyphes. c'est certain.

les poissons, c'était ton truc... mais seulement dans ton ventre. tu n'aimais pas vraiment leur tête. et puis, il y en avais quand même des trop moches dans ce monde. pourtant, tu avais accepté de venir visiter l'aquarium avec les quelques nouveaux amis que tu t'étais fait. une première sortie. c'était assez sympa, jusqu'à ce que tu finisses par les perdre. ouais, c'est possible de se perdre dans un aquarium... surtout avec le sens de l'orientation que tu ne possèdes pas. au bout de quelques minutes, tu décidais simplement d'arrêter de les chercher et d'envoyer seulement un message pour prévenir d'où tu étais. même si t'étais pas fan de poissons, t'allais quand même profiter un peu de la visite. t'étais donc là, devant cet aquarium qui te semblait vide. les sourcils froncés, tu t'apprêtais à quitter les lieux quand un son familier sonna dans tes oreilles. tu te retournais et ton regard se posa sur un mec penché sur le panneau descriptif. c'était bien de l'arabe que tu venais d'entendre non? tu continuais de le regarder. il avait l'air plongé dans la description, même s'il n'avait pas l'air de la comprendre.« do you need some help? » tu ne savais pas trop pourquoi tu avais décidé d'intervenir. sans doute parce que si tu avais été à sa place, tu aurais voulu que quelqu'un t'aide? ouais, sans doute.

tu comprends rien. tu dechiffres quelques mots basiques, mais les phrases te semblent trop compliqués. tu descends les yeux à la recherche d'une traduction mais il faut croire qu'ici, ils ont oublié l'arabe. et alors que tu comptes baisser les bras (t'es pas le genre à faire des efforts indéfiniment non plus), une voix chantante fait vriller tes oreilles. tu tournes aussitôt le visage vers celle qui te propose son aide. une femme te proposer son aide ? l'idée t’explose en tête. c'est pas quelque chose dont t'as l'habitude, ni même que tu conçois d'ailleurs. trop de fierté mal placé. ou c'est ce brin de machisme qui ressort sans que tu ne le contrôle. alors, tu pourrais l'envoyer balader. lui dire que non merci, tu vas te débrouiller seul comme le mâle dominant que tu es. tu pourrais, mais tu le fais pas. tu prends sur toi (à contre coeur quand même) et tu te recules du panneau, lui montrant l'aquarium du doigt. yes. (effort seti. effort.) you know que tu commences en cherchant tes mots. what there's inside ? tu te félicites personnellement. t'as fait une phrase. compréhensible ou non qu'importe. t'en as fait une.

ton niveau d'arabe était bien bas. oui, tu savais parler arabe (enfin, arabe tunisien)... un petit peu. tu avais des origines tunisiennes de ta mère, mais elle te parlait plus français qu'arabe (vu qu'elle est franco-tunisienne). du coup, tu avais fini par tout perdre. enfin, tu comprenais un peu, mais le parler... tu ne t'y risquais donc pas. tu maîtrisais bien plus l'anglais de toute façon. du coup, quand le gars se mit à jurer en arabe, tu reconnus tout de suite la langue. pas difficile non plus, même si le dialecte était différent. tu lui avais donc proposé ton aide. le gars semblait chercher ses mots. son niveau d'anglais ne devait pas être bien élevé. quelle idée d'être venu tout seul dans ce cas. sauf si, comme toi, il avait perdu son groupe. bref. tu reportes ton regard sur l'aquarium. « it's a fish. » quelle perspicacité. le pire, c'est que t'es restée sérieuse en disant ça. poker face. « the stonefish i think. » ton regard toujours porté sur l'aquarium, tu cherchais le poisson des yeux. pas facile en sachant qu'il se camouflait en mode pierre. « there, you see? » tu pointais alors du doigt un petit pâté de caillou. l'un d'entre eux bougea légèrement. sauf qu'un caillou, ça ne bougeait pas.

it’s a fish.. c’est tout ce qu’elle te répond. tu arques un sourcil, ne sachant trop comment prendre sa réponse. si tu dois rigoler parce que c’est une blague, même si tu rigoles jamais. ou si tu dois te braquer parce qu’elle se moque de toi. elle semble sérieuse et ça ne fait qu’aggraver ton état d’esprit. l’agacement qui hurle dans tes veines, qui s’y immisce toujours aussi vite, fait échapper un soupir de tes lèvres. t’aurais mieux fait de refuser son aide, oui. tu secoues légèrement la tête,  essayant de chasser les nuages zébrés d’éclairs de ta tête et tu l’écoutes à moitié. really ? tu t’approches un peu plus de l’aquarium. un poisson-pierre ? vraiment ? tu la juges un peu pour savoir si elle cherche encore à t’agacer (un peu plus ou un peu moins) ou si c’est simplement la réalité. et c’est là que du coin de l’œil, tu vois un truc bouger dans l’eau. tu reposes aussitôt tes yeux dessus, en les fronçant légèrement pour mieux les voir. elle pointe alors son doigt dessus. what the hell. he’s.. really awful. que tu t’exprimes sans quitter le poisson des yeux. move! tu tapotes la vitre pour le faire davantage bouger.

t'es ennuyante. t'as toujours été une fille ennuyante. chieuse. agaçante. t'as ce don qui perturbait toujours les gens. tu pouvais raconter les pires conneries du monde tout en restant sérieuse. et ça énerve ça. parce qu'ils savent jamais si t'es vraiment con ou si tu te fous simplement de leur gueule. la plupart du temps, c'est le deuxième cas. non pas que t'es con mais... tout le monde l'est un peu. là, sa question était idiote. une perche. tu l'avais attrapée. et il avait soupiré. ingrat. t'avais cherché à l'aider et tout ce que t'as en récompense, c'est un soupir. tous des ingrats. t'aurais pu réagir à son soupire, mais tu l'as pas fait. ton attention avait été attirée par quelque chose d'autre. tu le lui montrais, preuve que tu n'étais pas vraiment foutue de sa gueule. ou peut-être que si. et comme un imbécile, il s'est mis à taper sur l'aquarium. inconscient. « you do know that doing that can drive them crazy, right? » t'avais essayé de parler plus clairement possible, en utilisant un vocabulaire des plus simples pour qu'il puisse te comprendre. et comme toujours, poker face. t'es vraiment chiante quand tu t'y mets, thais.